Le dernier morceau de sucre
C’est une problématique à laquelle nous sommes régulièrement confrontés, devant un sucrier presque vide ou dans la queue d’un supermarché, par exemple :
Qui doit remplir le sucrier ? La personne qui prend le dernier morceau de sucre ou celle qui n’en trouvera pas ensuite ?
Qui doit poser la barre séparant les articles sur le tapis du supermarché ? La personne qui vient de vider son caddie ou celle qui attend de pouvoir le faire ?
Il est bien sûr possible de n’en rien faire et laisser la situation en l’état. Chacun refuse de faire ce minuscule effort et va chercher son sucre dans la boite en maudissant les autres, ou surveille qu’aucun de ses articles ne se mélange à ceux de l’autre en lui reprochant ce qu’il s’autorise à lui-même.
En deçà de cet extrême conflictuel, on trouve les deux situations les plus courantes, à savoir qu’une des deux personnes remplira le sucrier.
Quel intérêt pour l’écriture ? Le même que pour tout détail signifiant. Vous souvenez-vous du fusil de Tchekhov inversé ?
Il y a plusieurs raisons tant de refuser de remplir le sucrier que d’accepter de le faire, mais pas tant que ça. Fainéantise, égoïsme, désintérêt / Habitude, respect de l’autre, acceptation, entre autres.
(J’en profite pour pointer qu’il arrive souvent de s’arrêter à la première réponse trouvée sans jamais penser qu’il est possible que même juste, elle ne soit pas exacte dans la situation concernée. Il pourra donc être pertinent de préciser cette raison, en ajoutant une seconde scène signifiante par exemple.)
Dans votre histoire, la relation des colocataires va se dégrader ? Annoncez-le avec un morceau de sucre. La personne conflictuelle refusera l’effort, la soumise en fera trop, la manipulatrice fera bien savoir qu’elle est bonne et généreuse d’avoir pensé aux autres, ad lib.
S’il faut bien penser à accrocher un fusil au mur dans l’acte 1, lorsqu’un coup de feu est tiré dans l’acte 3, il est aussi constructif de placer un sucrier vide au début pour préparer notre auditoire aux relations qui vont suivre, sans en avoir eu l’air.
Bonne écriture à tous.